« La voix monocorde de Manie scandait le temps. Isa éprouvait une réelle incrédulité à écouter cette transe d’aveux funestes que sa grand-mère exprimait enfin. Les mots s’égrenaient. Ses paroles, nimbées d’un son lugubre, ne frappaient pas encore l’entendement d’Isa. Cependant elle commençait à découvrir le sens d’un drame, assurément antique, dont elle aurait été le sujet et la cause. Ce qu’elle venait d’entendre à propos de leur vie à eux – cette trilogie maudite, le temps d’un blasphème dont elle aurait été le fruit – déchirait l’épaisseur d’un voile noir composé de mille strates. Une lumière terrible éclairait son interminable questionnement. » I.I.
« Dans ce récit de ma vie, j’ai choisi de m’appeler Isa, ce prénom que je me suis donné au début de ma carrière de danseuse. Et j’ai volontairement occulté la plupart des noms de famille de tous les êtres que j’ai connus. Ainsi cette autobiographie peut-elle se lire comme un roman. » I. I.
…….
Irina Ionesco (1935-2022) naît à Paris puis passe son enfance en Roumanie où elle restera jusqu’en 1946. C’est en 1965 qu’elle s’enthousiasme pour la photographie et commence le parcours artistique qui la conduira à exposer dès 1970. Internationalement connue, elle multiplie les expositions et les publications de ses photographies, toujours des femmes maquillées, habillées et mises en scène avec soin, qui évoluent dans un univers étrange, fascinant. Avec L’Oeil de la poupée, son premier roman, la photographe s’expose elle-même dans une mise en scène autobiographique qui la dévoile sans restriction.